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KröniK | V/A - La gamme du vide (2018)


Tirant son nom de l'auteur du Précis de décomposition, Cioran Records offre avec "La gamme du vide", une somme agglomérant neuf projets et autant d'approches du pessimiste et du nihilisme. Parler de compilation serait pour le moins réducteur tant cet ensemble massif tient au final davantage de la collaboration entre des explorateurs du son aussi différents que complémentaires. L'entreprise balaie un spectre effrayant allant du Harsh noise au Dark ambient en passant par le drone en un kaléidoscope de sonorités et d'images tour à tour terrifiantes ou fantomatiques, désespérées parfois, perturbantes toujours.
Sa nature s'y prêtant, nous allons donc nous plonger successivement dans le fruit de chacun des neuf protagonistes quand bien même c'est dans son entièreté démentielle que "La gamme du vide" prend toute sa (dé)mesure hallucinée. Stase:Orgone pousse les portes de cet asile avec 'Abolir  l'âme, ses aspirations et ses abîmes', pièce stridente et bourdonnante dans les viscères de laquelle copulent bande-son industrielle et Harsh Noise oppressante. Dans une veine plus maladive et polluée encore, Un Regard Froid fait de 'Le vide parasite les murs / les murs dévorent le vide' un pandémonium bruitiste entre noise pestilentiel et power electronics gangreneuse, le tout étant rongé par une folie immersive. Pour sa part, Vomir fait ce qu'il sait faire de mieux, du pur HNW, mur statique de parasites qui confine à une forme de transe immobile. Suivent au centre du menu les participations de Macadam Charogne et son rituel qui fourmillent de miasmes electro noise, The Processus et ses deux pistes où s'emboîtent pistons mécaniques et démence corrosive et Viande à Viol dont le 'Trois fois rien et Rien de tes Morts' grouille d'ondes grésillantes et monotones. Puis avec Ouro, "La gamme du vide" entame sa troisième et dernière partie, entre drone et dark ambient. Plus posée peut-être mais pas moins sombre et désincarnée, témoin ce '[...]' dont la trame, hantée par des voix lointaines, est perturbée par un souffle funèbre comme échappée d'une architecture de fer abandonnée. Opasse livre avec 'Malconfort' une longue plage enveloppée d'ambiances spectrales aux allures de lente et paroxysmique élévation qui débouche sur un monde au bord du néant peuplé de fantômes et d'esprits échappés d'un gouffre mortifère. L'écoute meurt avec le curieux 'Sur les cimes du Styx' que Camecrude tricote grâce à des effluves étranges, presque spatiales et irréelles. "La gamme du vide" est une plongée dans les abîmes insondables de l'indicible, variations bruitistes et mortuaires sur un même thème nihiliste. 4/5 (08/04/2018)


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