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Malcuidant | Et la terre brûla... (2015)


On peut être viscéralement attaché aux valeurs qui ont fait - et font encore - la grandeur de l'art noir et ne pas vouloir sacrifier sur l'autel du evil et primitif à tout prix, puissance et mélodie. Malcuidant en constitue une superbe démonstration, groupe dont la sincérité se conjugue à une admirable exigence. De loin, celui qui fait désormais office de vétéran, ayant vu la huit il y a déjà presque vingt ans, pourrait se confondre avec toutes ces hordes de true black avec lesquelles il partage de sinistres apparats. De près pourtant, la réalité se révèle plus nuancée comme en témoigne Et la terre brûla..., troisième offrande dont l'impériale réussite s'impose comme une incontestable vérité. Le fait que ce soit Apparitia Recordings, sous-division de Drakkar Productions, qui l'édite, comme son prédécesseur Et les cieux s'assombrissent..., est en ce sens un signe qui ne trompe pas quant à sa valeur et à sa teneur. Malcuidant honore, sublime même, un Black metal plus éternel que traditionnel, brutalement épique et s'enracinant dans la terre sombre et ensanglantée de notre passé. Les textes dans la langue de Molière participent autant d'une poésie lugubre que d'une forme de grandeur, âpre et crépusculaire. Mais ce qui frappe avant tout à l'écoute de cette hostie est sa prise de son dont la pureté ne l'exonère pas d'une patine froide et obscure. La basse, en particulier, claque comme un fouet qui mord la chair. Brillant d'un lustre séculaire, l'écriture s'avère remarquable, oeuvre de musiciens aguerris qui possèdent une vision de leur art. En quarante minutes, les Français forgent ainsi dans la roche glaciale de montagnes inquiétantes drapées d'un suaire brumeux, des compositions tumultueuses qui creusent de vastes paysages au pouvoir d'évocation immense, à l'image de Mortelle et froide, monumentale entame irriguée par des lignes envoûtantes desquelles suinte une profonde mélancolie. Ce titre, sans doute le meilleur du lot, sert de patron aux cinq autres ruminations, à la fois torrentielles dans leur funeste et furieuse ascension et gonflées d'une sève puissamment mélodique. Si parfois, les atmosphères, lentes et hivernales, s'installent, elles sont toutefois très vite balayées comme un fétu de paille par une force minérale venu du fond des âges, tel ce Ornements de ténèbres dont la vélocité se pare d'une désespérée beauté. Tranchant et rocailleux, ces morceaux à l'écriture ciselée, redonnent toutes ses lettres de noblesse et son lustre empreint d'une ténébreuse gravité, à ce black metal héritier d'une longue lignée. Et la terre brûla... est un très grand disque. 4/5 (2016)


Imago Mortis | Carnicon (2014)


C'est quasiment avec un an de retard que nous découvrons aujourd'hui ce "Carnicon" presque résurrectionnel. Mais qu'importe en réalité car l'essentiel réside justement dans l'écoute impérieuse de ce nouveau méfait des Italiens à côté duquel il aurait été coupable de passer. Désormais vétéran de la chapelle noire de la péninsule, puisqu'il a vu la nuit, rappelons-le, en 1994, d'abord sous le nom de Nema avant de changer définitivement d'identité quelques mois plus tard, Imago Mortis est donc de retour après cinq ans de silence, seulement brisés par un maigre EP baptisé Sgabula en 2012. Si le groupe n'a jamais été réputé pour sa frénétique créativité, il n'en demeure pas moins qu'il a cette fois-ci pris son temps pour enfanter ce qui n'est finalement que sa troisième offrande en vingt ans d'activisme obscur. Nombreux sont qui l'attendaient. Ils ne seront pas déçus, retrouvant intacte cette aura cryptique généralement de mise chez les hordes noires italiennes, que l'on songe à Tenebrarum De Principio, Blaze Of Sorrow ou Abhor, pour ne citer que trois exemples, par ailleurs très différents les uns des autres, de cette identité occulte que le soleil méditerranéen n'a curieusement jamais empêché de se développer. S'il sonne d'une manière extrêmement mélodique, Imago Mortis sait pourtant toujours capter, à sa façon épique et crépusculaire, ce feeling ténébreux auquel le recours à des paroles chantées en italien, confère un charme très particulier en même temps qu'une espèce de patine séculaire, comme un mal venu du fond des âges et de la nuit. Selon son habitude, le groupe déroule un menu fait de longues complaintes tutoyant les dix minutes au compteur. Cela pourrait être ennuyeux et sombrer dans une lenteur suicidaire or ce n'est jamais le cas, qualité que ces compositions aux allures de funestes rituels, tirent autant d'une prise de son crue sans l'être trop que d'une interprétation impeccable et d'une architecture sinueuse, reptilienne dont les racines sont ces guitares tranchantes, scalpels labourant la peau mais néanmoins entêtantes ('Oltretomba'). Imprimant un tempo souvent rapide, les Italiens savent heureusement serrer le frein à main, ce qu'illustre 'Per Chi Ga Renega La Feede', monumentale amorce qui place d'entrée de jeu la barre très haut que les titres suivants ne surpasseront jamais vraiment, même si 'Hodie Mihi Cras Tibi', lequel trempe dans cet humus burzumien si cher aux Italiens, incarne un autre sommet de cet album tout du long superbe de noirceur, car nimbé de froides ambiances nocturnes, à l'image de cette silhouette encapuchonnée errant dans un cimetière brumeux... 3,5/5 (2015)