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KröniK | Tribulation - Down Below (2018)


Le fait qu'il soit suédois et forge du death metal ne doit pas vous tromper. Tribulation n'est plus, depuis longtemps, le simple héritier d'un  metal de la mort sinistre et grumeleux où pataugeaient l'EP "Putrid Rebirth" et l'originel "The Horror". A partir de "The Formulas Of Death",  le groupe a brutalement entamé sa mue, délaissant le bestiaire morbide pour un art plus audacieux, nourri aux effluves progressives. Ceux qui, après un "Children Of The Night" qui enfonçait encore un peu plus le clou dans cette peau évolutive, espéraient un (vain) retour aux sources au moment de déflorer "Down Below", en seront encore une fois pour leur frais.
Oubliez définitivement leurs premiers rots qui sentaient la charogne et attiraient un nuage bleuté de mouches, les Suédois ne franchiront plus jamais le Styx. Ce dont on ne peut que se féliciter puisque ce glissement vers une musique plus sophistiquée quoique toujours tranchante s'est accompagné d'une créativité en ébullition. Si, par rapport à ses devanciers, l'effet de surprise ne joue plus, ce quatrième album n'en reste pas moins impressionnant. Basé sur le même patron que "The Children Of The Night", il propose un ensemble relativement concis, dont la courte durée (trois quarts d'heure) lui confère une grande densité. Ainsi, plus les années passent et plus Tribulation apprend à resserrer son canevas sans pour autant tarir sa source créatrice. Loin d'un appauvrissement, il  en résulte des compositions aux allures de pièces d'orfèvrerie dont le mécanisme fonctionne avec une admirable fluidité, témoignage éloquent de la maîtrise à laquelle leurs auteurs sont parvenus. Du passé extrême, il ne reste plus guère que le chant écorché du bassiste Johannes Andersson, lequel hachure ces paysages que percent des guitares souvent lumineuses ('Nightbound'). Malgré tout, la joie de vivre a été comme toujours éconduite d'une partition écrite à l'encre noire. Les claviers brumeux qui ont l'air de s'être échappés d'un giallo ('Subterranea' et son intro à la Goblin) tapissent de tentures ténébreuses les parois de cet édifice aux multiples travées. Chaque titre qui jonche "Down Below" conjugue à la fois reliefs abrupts et richesse instrumentale, accroches incisives et ambiances délicates. 'Cries From The Underworld', strié de lignes de guitares aériennes, 'The World' et ses accords entêtants que ne renierait pas Paradise Lost ou 'The Lament', implacable et atmosphérique tout ensemble, pour ne citer que trois exemples, illustrent toutes les nuances de cette palette d'une ébouriffante richesse. Au bout de l'album, 'Here be Dragons', du haut de ses sept minutes au garrot, symbolise pour sa part toute l'ambition des Suédois désireux de couler dans un substrat extrême et affûté un jus progressif assombri d'émanations horrifiques. "Down Below" reprend les choses où les a laissées son prédécesseur dont il polit les formes tourmentées d'un death black de plus en plus évolutif. 3.5/5 (10/12/2017)






KröniK | Derealized - Isolation Poetry (2016)


Ceux qui, attirés par la présence (trompeuse) d'une jeune femme derrière le micro, s'attendaient à  picorer dans les entrailles de cet "Isolation Poetry" inaugural un peu de douceur, en seront bien entendu pour leur frais !
Point de tendres et romantiques mélopées ici, mais au contraire une diarrhée bestiale régurgitée par un organe d'outre-tombe dont il faut savoir qu'il est celui d'une chanteuse, la féroce et néanmoins sympathique Myriam Fisher en l'occurrence ! Ce n'est d'ailleurs là pas la seule surprise que nous réserve ce premier méfait de Derealized, jeune horde qui a vu la nuit à Besançon en 2014. Martelant un art noir puissamment sombre, à la fois écartelé par des influences death metal et gonflé d'une sève progressive, le quatuor enfante un magma dont l'évidente complexité ne l'exonère en rien d'une brutalité aussi millimétrée que ténébreuse. S'il témoigne à nouveau que le temps des premiers pas maladroits, ramollis par une prise de son faiblarde, est bel et bien révolu, "Isolation Poetry" fait partie de ces opus que de multiples plongées dans ses ombrageuses arcanes conditionnent une juste et globale appréhension, faute de quoi il est aisé de rester au bord du chemin en n'ayant pas tout compris de cette cascade haineuse et technique.Bref, du haut de ses plus de 50 minutes d'agression tendue et serrée au compteur, cet ambitieux exercice se mérite, ouvrant les vannes d'une noirceur bouillonnante, qui couve dans l'intimité caverneuse de compositions dont les nombreux pans se chevauchent comme des plaques tectoniques. Propulsé par des blasts métronomiques, ces pièces massives taillées dans un bois tranchant serpentent à travers un labyrinthe d'ambiances que fracturent des breaks à foison ('A Late Letter'). Quelques rais de lumière salvateurs que ne renierait pas Opeth ('Hollow') permettent heureusement de reprendre son souffle, maigre respiration, à l'image du court instrumental 'Cover My Eyes', que tapissent toutefois des couleurs crépusculaires, au milieu de ce torrent de violence (presque) ininterrompue qui emporte tout en une épaisse coulée de sang. Tour à tour remparts d'une forteresse cyclopéenne ou pinceaux trempés dans de sourdes mélodies ('Isolation Poetry'), les guitares tissent un maillage d'une redoutable intensité que soulignent les growls échappés des profondeurs d'un gouffre de négativité. Ni approximation ni faiblesse ne viennent miter ce canevas parfaitement équilibré entre arabesques tentaculaires et atmosphères qui bourgeonnent de sentiments écrits avec une encre noire indélébile. Les ayatollahs de l'orthodoxie feront sans doute la gueule. À tort, car cette effrontée virtuosité ne rend le black metal gravé par Derealized que plus foudroyant, comme l'illustrent un 'Devil's Got Green Eyes' tumultueux ou ce 'Torment's Work' aux lourdes racines death metal. De cette architecture alambiquée jaillissent des instants de grâce mortifère, témoin l'immense 'The Opium Den', lequel résume en un peu plus de huit minutes une signature d'une foisonnante richesse. Premier album aux allures de coup de maître, "Isolation Poetry" est l'acte de naissance d'un groupe promis à un très bel avenir. (2016) | Facebook






Eloa Vadaath - A Bare Reminiscence of Infected Wonderlands (2010)


Le visuel, ainsi que les illustrations qui décorent le livret, à l’ancienne, coloré et teinté de psychédélisme, sont un peu à l’image de ce galop d’essai de Eloa Vadaath : maladroits mais frais, personnels et non dépourvus d‘idées. Né en 2006 et signé chez la jeune structure West Witch Records dont ils sont la première sortie, ces Italiens ont décidé d’arpenter les terres Ô combien casse-gueule de ce qu’on appelle parfois l’extrême progressif, soit un métal qui galope un peu partout et mange à tous les râteliers, death, black, prog… A cette panoplie, le groupe ajoute même une touche folklorique qui s’exprime par l’entremise de lignes de violon. Reconnaissons-lui au moins le courage de ne pas chercher à éviter les difficultés, ainsi qu'une certaine réussite qui, s’accompagne cependant de quelques maladresses. Déséquilibré, le menu souffre ainsi d'un milieu de parcours plus faible en comparaison du début et de la dernière partie, tandis que le son capturé dans un monastère, bien qu'il fasse la fierté du groupe, manque d'emphase et de puissance. Ces faiblesses ne grèvent au final pas trop le plaisir que l’on ressent à l'écoute de ce disque. Péchant par excès d'ambition pour ne pas dire de prétention, Eloa Vadaath et son art protéiforme pourront (forcément) évoquer Opeth, le génie en moins. Néanmoins, en dépit de ces airs d’auberge espagnole où copulent chant black métal, voix claires, chœurs féminins, nappes symphoniques, breaks épiques, descentes de manche malmsteeniennes, cet album garde une étonnante limpidité quand bien même l’indigestion n’est pas toujours évitée (le néanmoins bon "64 A.D. - Le flambeau"). Les Italiens ne sont pas avares en idées, ouvrent des pistes, mélangent les genres en une symphonie chaleureuse et joyeusement bordélique ("The Navidson Record", "Uncontaminated" qui semble partir dans tous les sens malgré des fissures jouissives). Si l’on n’est parfois bien obligé de lui reprocher de vouloir trop bourrer le sac de voyage, Eloa Vadaath se déleste cependant d’une poignée de compositions à la tenue de route plus sure. Citons "Coalesce Part I : A Perverter Among The Kaïnites", "A Bare Reminiscence Of Infected Wonderlands" ou le long et terminal "Coalesce Part II", rehaussé d’arrangements soignés. Bien qu'intéressant, A Bare Reminiscence Of Infected Wonderlands parait trop dense, et le groupe devra à l'avenir canaliser à tout prix une inspiration par trop hétéroclite s'il veut imposer son curieux patronyme. Comme il devra se doter d'une production plus ample qui rende davantage hommage à son travail. Toutefois, on a connu premier jet moins convaincant... (2010)