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Clint Eastwood | Josey Wales hors-la-loi (1976)


En quelques mots : Second des quatre westerns qu’a réalisé Clint Eastwood, Josey Wales hors-la-loidemeure certainement le meilleur d’entre eux et l’œuvre la plus aboutie du cinéaste. Si L’homme des hautes plainesbaignait encore dans l’influence de Sergio Leone et de la trilogie des dollars, Josey Wales hors-la-loi s’éloigne quant à lui de la plupart des westerns tournés à une époque où le genre ne fait d’ailleurs plus recette, et s’inscrit davantage dans une certaine tradition du western américain, celle des grands maîtres que sont William Wellman ou John Ford, ne serait-ce déjà que par l’époque précise à laquelle il se déroule. Il renoue avec une certaine forme de classicisme tout en demeurant furieusement moderne, ce qui a toujours été une des ambitions de Clint Eastwood. Le point de départ du film réside dans un petit livre de Forrest Carter qui plût énormément à Eastwood. Très vite, il engage Philip Kaufman pour le mettre en scène. Mais suite à de nombreux différents artistiques, ce dernier est renvoyé par l’acteur qui décide de le réaliser lui-même. Cet incident suscite l’ire de la Screen Of Director’s Guild qui institue alors l’amendement Eastwood, lequel interdit désormais à tout membre de l’équipe de tournage de mettre à la porte le metteur en scène. Clint écope au passage d’une amande de 60 000 $. Mais le sujet lui tient trop à cœur pour le voir massacrer par quelqu’un d’autre. Le film possède en effet une richesse incontestable. Il porte un regard pertinent sur la guerre de Sécession en montrant les Nordistes comme des bouchers sanguinaires. Le sort des Indiens dorénavant parqués dans des réserves est également évoqué avec beaucoup de justesse. En outre, pour la première fois peut-être, ce peuple est décrit avec humour, loin du monolithisme souvent de rigueur, notamment à travers le personnage de Lone Watie, admirablement joué par Chief Dan George, qui donne justement l’impression de ne pas jouer. Il s’agit donc d’un superbe western pro-indien, comme le prouve la rencontre cruciale entre Josey Wales et Grand Bison, délivrant un vibrant message de paix et de fraternité. Josey Wales hors-la-loi est une œuvre typiquement eastwoodienne. Comme souvent chez le cinéaste, le film dévie à un moment donné de sa trajectoire de départ. Bien sûr, l’histoire s’articule autour de la vengeance de ce modeste fermier qui voit sa femme et son fils massacrés par des Pattes Rouges et traqué par ces derniers, mais très vite, elle se transforme en une sorte de horse-moviepicaresque à travers le Texas et le Missouri, voyant Josey Wales rassemblé autour de lui une petite troupe hétéroclite composée d’un vieux chef indien, d’une squaw, d’une vielle femme et de sa petite-fille et d’un chien errant, tout comme eux. Après un long périple semé d’embûches et de violences, ils parviennent à destination et s’installent tous ensemble dans une ferme qui apparaît comme un havre de paix au regard des péripéties qu’ils ont vécu. Le film débute comme une ode à la vengeance et se conclut en fable humaniste, ce qui en fait toute son originalité et sa valeur, quand bien même Wales parviendra au bout de sa quête avant de disparaître. Clint aime interpréter cette figure de paria, d’homme solitaire hanté par une obsession qui confine à la mission rédemptrice, laquelle se retrouve dans tous les westerns qu’il a mis en scène. Le thème de la famille de substitution que l’on reconstitue traverse aussi toute son œuvre, de Bronco Billy à Million Dollar Baby, de Honkytonk Man à Un monde parfait. Le film aborde un autre sujet cher à Eastwood, celui de la violence et de ses conséquences. Il démontre que la guerre touche tout le monde, non seulement les soldats mais aussi les civils comme l’illustre le massacre de la famille de Josey. Ce western porte également la griffe de Clint Eastwood par sa vision de l’Ouest, un monde désolé, violent et crépusculaire. Filmé à la fin de l’automne, saison que l’acteur affectionne pour ses couleurs et durant laquelle il a tourné la plupart de ses autres westerns, Josey Wales hors-la-loi est une œuvre ample d’un grande beauté plastique, dotée d’une réelle dimension épique et habillée d’une très belle partition de Jerry Fielding, dont la création sera nominée à l’oscar. Il marque en outre la rencontre entre Clint Eastwood et celle qui sera sa compagne jusqu’en 1988, Sondra Locke. Bien que soumise à un viol (ou tentative), comme dans L’épreuve de force, Bronco Billy et Le retour de l’inspecteur Harry, l’actrice paraît assez effacée et très éloignée des rôles qu’elle tiendra plus tard dans les films de son compagnon. Josey Wales hors-la-loi prouve déjà dans tous les cas le talent remarquable de Clint Eastwood dont il s’agit seulement de la cinquième réalisation.

Don Siegel | L'inspecteur Harry (1971)


En quelques mots : "L’inspecteur Harry" inaugure une série de cinq films produits entre 1971 et 1988, et qui vont faire de l’acteur une star, voire un mythe tout en lui collant une étiquette de dangereux réactionnaire dont il aura bien du mal à se débarrasser. Tourné avec toute la nervosité nécessaire et coutumière du réalisateur, "L’inspecteur Harry" se révèle être déjà un excellent polar pour le moins efficace, très rythmé (la musique de Lalo Schifrin n’y est sans doute pas pour rien) , au scénario parfaitement architecturé et riche en scènes d’action. Longtemps cantonné à la série B, Don Siegel appose sa griffe à ce film admirable de sobriété et de concision. Pas un plan superflu, aucun effet facile ne viennent parasiter la conduite du récit menée avec une urgence presque palpable. Siegel parvient à rendre avec beaucoup de réalisme le tissu urbain. Baignant dans une ambiance trouble et violente (la nuit semble peuplée de voyous en tout genre), la vision de San Francisco ici dépeinte s’avère très éloignée, volontairement d’ailleurs, de celle de Bullitt qui offrait en 1968 un éclairage plus pittoresque de la ville californienne. Mais au delà de ses incontestables qualités, c’est son personnage principal qui a fait la renommée du film. Harry Callahan est un flic désabusé, solitaire, individualiste et raciste. Recourant à des méthodes expéditives, il ne s’embarrasse pas de scrupules pour abattre les criminels de tout poil, se faisant le bras armé d’une justice par trop laxiste. Il est un chasseur pour qui seule la traque des meurtriers compte. Il n’a plus de vie sociale et une vie privée réduite au minimum. Le plus important pour lui est son métier. Dirty Harry apparaît comme un héros pour le moins ambigu, certes du bon côté de la loi, mais n’hésitant pas à recourir aux mêmes méthodes (le Magnum 44 le prouve) que les meurtriers qu’il traque. Parfois, la frontière entre le bien et le mal semble difficile à définir clairement, comme souvent chez Eastwood. Ainsi, lors de l’affrontement final, Callahan et Scorpio, chacun mu par des pulsions meurtrières confinant à l’obsession, ne sont finalement pas si éloignés l’un de l’autre. Ils constituent en quelque sorte les deux faces d’une même pièce. Seul Clint Eastwood pouvait interpréter un tel rôle, prêtant à celui-ci son regard froid et plissé, son hiératisme, son humour empreint de cynisme et son charisme. Suite aux critiques que le film, conçu comme une sorte de western urbain, a suscité, Clint Eastwood tentera de se défendre en en tournant une suite deux ans plus tard : Magnum Force.