Considéré comme une des figures tutélaires de la scène progressive italienne, Antonius Rex fait partie de ces groupes qui ne laissent personne indifférent. Admiré par certains pour des morceaux d'anthologie tels que Neque Semper Arcum Tendit Rex (1974) et surtout Zora (1978), détestés par d’autres qui ne comprennent rien à cette musique souvent vierge de lignes vocales, sombre et baroque, l’entité repose sur l’alchimie artistique qui existe entre son leader et guitariste (et accessoirement chanteur) Antonio Bartoccetti et la tout aussi flamboyante claviériste Doris Norton.
Trois ans après l’intéressant Switch On Dark, Antonius Rex enfante encore une fois avec Per Viam d'une œuvre à sa (dé)mesure. Plus mystique que jamais, ce huitième rituel (sans compter les deux opuscules sous le nom de Jacula entre 1969 et 1972) déroule un canevas assez unique, théâtral et mystérieux, dont la charpente sont ces compostions généralement longues - la dernière d’entre elles dépasse ainsi les onze minutes - en forme de labyrinthe dans lesquelles grouillent toutes sortes de bruitages qui leur confèrent des allures de bandes originales de films. De fait, les premières écoutes de Per Viam peuvent décevoir, distillant une impression d’inachevé, de fourre-tout bordélique. Ne pouvant s’accrocher à un chant qui ne se résume qu’à une poignée de murmures, de rires, voire d’incantations, hormis le temps d’un « Ufdem » plus classique dans sa construction, l’auditeur erre tout d’abord au milieu de ces méandres dominées par les nappes synthétiques que tapisse Doris Norton et le jeu de guitare habité du maître des lieux. Pourtant peu à peu, le charme opère, une puissance d’envoûtement souterraine invite à replonger dans ces dérives dark progressives au parfum d’ésotérisme trouble. Après une mise en bouche pompeuse dans le bon sens du terme avec ses volutes liturgiques, le morceau éponyme installe tout doucement ses ambiances noires et symphoniques, monte en puissance et finit en un pandémonium démentiel et absolument jouissif. Comme sur Switch On Dark, c’est tout d’abord Doris qui domine le jeu avec ses notes qui dégoulinent de partout et il faut réellement attendre « Woman of the King » et plus encore « Spectra » pour savourer les lignes pleines de feeling de Antonio Bartoccetti qui fait jaillir de son manche un torrent de notes parfois aux confins du hard rock comme durant le grandiose « Angels & Demons ». Et que dire de sa performance nerveuse sur « Ufdem », que rend encore plus étrange le chant presque androgyne de Doris Norton. Per Viam meurt sur le crépusculaire « Antonius Rex Prophecy », lente conclusion émotionnelle que guide la présence narrative du musicien et la belle emphase d’un piano doucement mélancolique. Toujours aussi singuliers, les Italiens livrent un grand disque fidèle à leur légende - qui ne fera certes pas l’unanimité - et auquel ils impriment ces atmosphères hypnotiques qui n’appartiennent qu’à eux. Qu’il est agréable de voir un groupe - terme par ailleurs maladroit car il amoindrit toute la portée messianique et cultuelle du duo - qui près de quarante ans après ses premiers balbutiements, continue de travailler son art avec une inspiration quasi divine et toujours aussi foisonnante. 4/5 (2010) | Facebook
Trois ans après l’intéressant Switch On Dark, Antonius Rex enfante encore une fois avec Per Viam d'une œuvre à sa (dé)mesure. Plus mystique que jamais, ce huitième rituel (sans compter les deux opuscules sous le nom de Jacula entre 1969 et 1972) déroule un canevas assez unique, théâtral et mystérieux, dont la charpente sont ces compostions généralement longues - la dernière d’entre elles dépasse ainsi les onze minutes - en forme de labyrinthe dans lesquelles grouillent toutes sortes de bruitages qui leur confèrent des allures de bandes originales de films. De fait, les premières écoutes de Per Viam peuvent décevoir, distillant une impression d’inachevé, de fourre-tout bordélique. Ne pouvant s’accrocher à un chant qui ne se résume qu’à une poignée de murmures, de rires, voire d’incantations, hormis le temps d’un « Ufdem » plus classique dans sa construction, l’auditeur erre tout d’abord au milieu de ces méandres dominées par les nappes synthétiques que tapisse Doris Norton et le jeu de guitare habité du maître des lieux. Pourtant peu à peu, le charme opère, une puissance d’envoûtement souterraine invite à replonger dans ces dérives dark progressives au parfum d’ésotérisme trouble. Après une mise en bouche pompeuse dans le bon sens du terme avec ses volutes liturgiques, le morceau éponyme installe tout doucement ses ambiances noires et symphoniques, monte en puissance et finit en un pandémonium démentiel et absolument jouissif. Comme sur Switch On Dark, c’est tout d’abord Doris qui domine le jeu avec ses notes qui dégoulinent de partout et il faut réellement attendre « Woman of the King » et plus encore « Spectra » pour savourer les lignes pleines de feeling de Antonio Bartoccetti qui fait jaillir de son manche un torrent de notes parfois aux confins du hard rock comme durant le grandiose « Angels & Demons ». Et que dire de sa performance nerveuse sur « Ufdem », que rend encore plus étrange le chant presque androgyne de Doris Norton. Per Viam meurt sur le crépusculaire « Antonius Rex Prophecy », lente conclusion émotionnelle que guide la présence narrative du musicien et la belle emphase d’un piano doucement mélancolique. Toujours aussi singuliers, les Italiens livrent un grand disque fidèle à leur légende - qui ne fera certes pas l’unanimité - et auquel ils impriment ces atmosphères hypnotiques qui n’appartiennent qu’à eux. Qu’il est agréable de voir un groupe - terme par ailleurs maladroit car il amoindrit toute la portée messianique et cultuelle du duo - qui près de quarante ans après ses premiers balbutiements, continue de travailler son art avec une inspiration quasi divine et toujours aussi foisonnante. 4/5 (2010) | Facebook
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