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Abduction | All Pain As Penance (2019)



















Si le nom de Abduction évoquera chez certains d'entre vous une formation hexagonale de black death progressif, elle n'est portant pas la seule à s'appeler ainsi. Le sujet de cette chronique a vu la nuit de l'autre côté de la Manche, au Royaume-Uni. Point de partition évolutive sinon sophistiquée par ici. Pas davantage de groupe non plus car ce Abduction là pratique l'onanisme musical, one-man band comme il en pullule dans l'art noir.

Si nous avons appris à nous méfier des musiciens qui planquent leur identité sous une capuche et derrière de simples initiales ou un patronyme étrange, ce projet mérite toutefois (bien) mieux que cette allégeance à une tendance désormais trop courante qui, de fait, n'annonce généralement pas une originalité démesurée. Mais A | V (pseudonyme d'un certain Phil Ilsley) a des idées, et des bonnes surtout. Souffrant de diarrhée créatrice, "All Pain As Penance" est déjà son troisième méfait depuis 2016, sans compter le EP "Respiratory Prison". Les mauvaises langues argueront que ce genre d'entités solitaires se prête au stakhanovisme, dans le black metal surtout où elles n'ont jamais été rares. Ce qui est vrai. Ces mêmes mauvaises langues insisteront également sur le fait que ces projets entre les mains d'une seule créature qui se charge de tous les instruments, n'échappent pas à une certaine approximation technique. Ce qui n'est pas (toujours) juste. Preuve en est donc de cet Anglais dont l'isolement ne s'entend absolument pas tout du long de cet album chargé d'une riche semence. Alors que son titre semble promettre un black metal d'obédience suicidaire, le chemin qu'il suit se veut plus brutal et direct, quand bien même toute trace de joie a bien entendu été éconduite d'un menu tendu comme une verge d'ébène dressée dans les ténèbres.

A l'exception de 'Convulsing At Baalbek' et 'The Funeral of Cosmic Mastery', les pistes affichent la forme ramassée d'implacables saillies dont le rythme soutenu les poussent à l'intérieur d'une fente obscure qu'elles écartèlent avec le tranchant de scalpels ferrugineux. Amorce aiguisée, 'Infinite Ancient Hexes' laisse les racines thrash façon celtic Frost ou Bathory du Britannique affleurer à la surface cependant que 'Prayer Of Electocution' galope sur les lourdes et sinistres terres de l'art noir ukrainien ou polonais. Mais, brillant de lueurs automnales, 'Seven Apparitions of Suffering' témoigne que les paysages atmosphériques plantées le long d'une route lancinante ne sont pas pour lui déplaire. Mortifères, les claviers polluent l'album d'un brouillard dark ambient au détour d'un 'Embatted' inquiétant et participe d'une ambiance morbide qui suinte même des pulsations les plus belliqueuses. Intense, "All The Pain Is Penance" est une hostie aux multiples nuances, à la fois orthodoxe dans son accroche, morbide dans ses émotions caverneuses, révélatrice en cela de la noirceur pourrissante  de notre époque.  (09.03.2019)



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