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KröniK | Shores Of Null - Black Drapes For Tomorrow (2017)


Avec les Italiens, il en va (souvent) de la musique comme du cinéma d'exploitation, suiveurs de modes plus qu'ils ne les créent, ce qui n'enlève absolument rien à leur talent parfois dilettante mais sympathique et joyeusement artisanal. De fait, il faut moins attendre de Shores Of Null une quelconque personnalité qu'une impression tenace de déjà-entendu. Son compatriote Novembre, Paradise Lost (surtout) et d'une manière générale le UK doom des années 90 sont ainsi convoqués par une horde dont les membres ont promené leurs guêtres au sein d'obscures formations de l'underground transalpin (Zippo, The Orange Man Theory...).
Toutefois, cela ne fait ni de lui un mauvais groupe ni de "Black Drapes Of Tomorrow" un disque honteux, bien au contraire. Précédé d'un premier album baptisé "Quiescence", il y a trois ans, cette offrande se révèle même des plus efficaces. Joie et espoir y sont refoulés pour le plus grand bonheur des amateurs d'un gothic doom néanmoins plus mélodique que mortuaire. Sur un lit de guitares contrites et souvent obsédantes dans la grande tradition misérable du genre ('Donau'), le chant de Davide Straccionne a quelque chose d'une vigie perçant la brume. Son timbre parfois plus que proche de celui de Nick Holmes arrime d'emblée les Romains à cette école anglo-saxonne de la tristesse. La beauté ensoleillée qui suinte de 'The Enemy Within', pause instrumentale dépouillée, témoigne cependant que Shores Of Null ne rivalisera jamais avec son aîné de la Perfide Albion en termes de négativité charbonneuse, même si de lointains growls injectent à l'ensemble une coloration black metal qui ne s'imposait pas. Nonobstant une écriture impeccable que matérialise une interprétation ad hoc, "Black Drapes Of Tomorrow" souffre moins en définitive de son identité peu affirmée que de son déficit en noirceur, origine méditerranéenne oblige. Car, à quelques notables et ténébreuses exceptions (Forgotten Tomb, Abhor…), les Italiens ne parviennent jamais vraiment à peindre la douleur funèbre et minérale qui est celle des groupes du nord de l'Europe. Il suffit d'écouter le néanmoins entêtant 'Carry On, My Tiny Hope' pour mesurer le gouffre émotionnel qui sépare le quintet de l'auteur de "Draconian Times". Reste que cette seconde offrande, si elle trempe ainsi davantage son dard dans le sirop que dans le sang, offre de belles compositions telle que 'We Ain't Ashes', engourdie par une lenteur atmosphérique, le très paradiselostien 'Tide Against' ou bien encore 'House Of Cries' dont les harmonies vocales évoquent quant à elles Novembre. Formation de série B, Shores Of Null se fend avec "Black Drapes Of Tomorrow" d'une hostie aussi maîtrisée que dénuée de personnalité et de la noirceur espérée. 2.5/5 (2017) | Facebook






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