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KröniK | Trees Of Eternity - Hour Of The Nightingale (2016)


Certains ne se contentent pas de jouer du doom, ils vivent le genre jusqu'au bout, bien malgré eux, en croisant la mort sur leur chemin. Tel est le cas de Trees Of Eternity, entité marquée du sceau de la fatalité et de la tragédie. Le projet nait en 2009 du désir du patron de Swallow The Sun, le guitariste Juha Raivio, associé à la chanteuse d'origine sud-africaine, Aleah Stanbridge, de poursuivre leur collaboration après que celle-ci ait participé à la chanson 'Lights On The Lake' sur « New Moon », quatrième opus des maîtres du death doom finlandais. Rapidement quelques titres commencent à circuler sur la toile, esquisses prometteuses d'un art délicat englué dans une mélancolie blafarde. Alors que la belle prête sa voix à Amorphis à l'occasion de « Under The Red Cloud », sans pour autant quitter le giron maternel (« Emerald Forest And The Blackbird »), le duo devient un groupe en recrutant les anciens Katatonia, Fredrik et Mattias Norman, qui tiennent respectivement la seconde guitare et la basse, ainsi que le batteur Kai Hahto (Wintersun) et un album est mis en boîte en 2014. Mais avant que « Hour Of The Nightingale » ne voit finalement le jour, Aleah perd son combat contre le crabe, s'éteignant à l'âge de trente-neuf ans, le 18 avril 2016. Cette œuvre posthume se veut donc le testament d'un ange dont nous étions nombreux à attendre l'envol. S'il ne pourra incarné la rampe de lancement espéré, pour la défunte vocaliste autour de laquelle il est tout entier bâti, l'opus n'en demeure pas moins habité par son âme et sa personnalité, à l'image du superbe artwork qui lui sert d'écrin, que Fursy Teyssier (Les Discrets) a réalisé après avoir longuement échangé avec Juha à propos de cette fée trop tôt disparue. De fait, il paraît bien difficile d'occulter ce funèbre destin en s'abîmant dans les limbes vaporeuses de cette prière que la mort imprègne en profondeur. Comment ne pas être ému en écoutant le prémonitoire 'My Requiem' comme si Aleah savait déjà sa fin proche. Caresse fantomatique, son chant éthéré participe de l'aura funéraire de ces complaintes qui baignent dans une grâce spectrale. Quoique secondée par deux invités de choix, Mick Moss (Antimatter) sur 'A Million Tears' et surtout Nick Holmes (Paradise Lost) sur un 'Gallows Bird' au traits granitiques, ce pinceau vocal se révèle être la principale clé de voûte de cette cathédrale de tristesse que nimbent des nappes de claviers brumeuses et derrière lequel s'effacent, comme avalées par la nuit, des guitares tour à tour encroûtées par la mélancolie ('Eye Of Night') ou squelettiques ('Hour Of The Nightingale'). Entre Swallow The Sun et le gothic doom à la suédoise façon Draconian et consorts, en moins lourd et plus évanescent toutefois, Trees Of Eternity signe un album ciselé avec amour et sincérité, qui est à l'image de ses deux fondateurs, dont on retrouve ces lignes mélodiques engluées par l'hiver pour l'un et la magie vaporeuse de vocalises touchées par la grâce, pour l'autre. Pétries de douleur mais irradiant néanmoins une pale lumière, les chansons s'égrènent comme suspendu dans le temps, à tout jamais, contrites et intimistes ('Sinking Ships'), écrites à l'encre noire du désespoir ('Black Ocean'), plus rarement plombées ('Eye Of Night') sans pour autant se montrer avares en riffs d'airain ('Broken Ocean'). Miraculeux et tout du long ourlé d'émotions, « Hour Of The Nightingale » n'en laisse pas moins un goût étrange teinté d'amertume, guidé par cette voix venue des limbes qui résonne comme un ultime appel... 3.5/5 (2016)

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