AU PIF

Praÿ | S/T (2019)



















Ils sont trois : Maud à la gratte, Jason à la basse et Antoine derrière les fûts. Le fait de voir une fille caresser le manche d'une guitare n'est pas le seul intérêt de Praÿ, groupe basé à Lyon (la ville de naissance de votre serviteur) qui vidange un stoner doom gargantuesque dont le fuselage brille de lueurs spatiales.

Point de chant à l'horizon (ce n'est pas grave) mais surtout beaucoup de bruit, un bruit lourd plein d'une rondeur sismique. Le power-trio signe cette année son premier voyage, véritable rampe de lancement vers l'immensité stellaire qu'il explore par le biais de (très) longues pistes qui ne débandent jamais en-dessous de la barre des dix minutes au jus. Des compos dilatées embarquant un rock aux courbes psychédéliques laissent craindre un ensemble mou de la douille, tricoté par des musiciens ivres de leur semence cotonneuse. Nous en sommes pourtant très loin avec Praÿ qui conserve toujours ses pattes enfoncées dans la glaise. C'est ce qui donne tout le sel de cet opus aussi stratosphérique que pesamment charpenté. Bourrus et lunaires, ces titres, par leur durée généreuse, nous installent dans un cockpit ensorcelant pour un périple démentiel  tout en offrant à leurs architectes l'espace nécessaire pour donner libre court à leur logorrhée velue dont la puissance de frappe affole le compteur Geiger.

Une quatre-cordes gourmande qui galope (l'énorme 'Sulphur' !) copule avec une batterie groovy et toujours terrestre sous l'œil malicieux d'une guitare qui marie à la délicatesse cosmique la lourdeur d'une poutre à l'image de 'Bottom of The Universe', lente et massive élévation. Le groupe s'emploie constamment à briser la linéarité d'une trame qui oscille entre atmosphères astrales et féroces accroches, comme en témoigne ce 'Heretic Eye' bûche monumentale dont la dernière partie tutoie les étoiles. Jamais ennuyeux, Praÿ n'a nul besoin de chant pour passionner tout du long grâce à une écriture puissamment agile aux allures de jams infernales. Pour leur première sortie, les Lyonnais se fendent d'un vrai coup de maître, livrant même une des plus belles découvertes de l'année 2019 en matière de sonorités enfumées (mais pas que). Si nous attendons désormais avec une grande impatience le successeur de ce galop d'essai, le groupe a d'ores et déjà placé la barre tellement haut qu'il est quand même permis de se demander comment il pourra faire mieux par suite. C'est néanmoins tout ce qu'on lui souhaite et s'il y parvient, c'est alors la trique des grands jours qui nous est promise !  (25.10.2019)

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