Depuis, l'entité se murait dans un lourd silence et ce n'est pas vraiment Grlscz, projet parallèle encore maladroit bien qu'attachant de Cédric Seyssieq, écrivain, photographe et maître des lieux, qui aura su combler une absence qui semblait vouloir peu à peu se muer en tombe. Et alors que nous craignions qu'il ne finisse donc par disparaître à tout jamais, Grey November surgit aujourd'hui du brouillard, en livrant - enfin - une troisième hostie. Au moins, cette rareté ne le rend que plus précieux. Offrande que nous n'attendions presque plus, "L'Autre Mort" est maintenant là, habillée d'un digipack épuré qu'édite le label russe GS Productions. Son titre et l'écrin fantomatique qui le drape nous rassurent d'emblée sur un point : le goût que Cédric cultive pour les univers sombres demeure intact, ainsi que son inspiration. Linceul funèbre et lignes vocales spectrales hantent cette nouvelle création aux couleurs terreuses. Après avoir transposé Edgar Poe, le musicien adapte son propre roman où trois personnages rongés par les regrets, l'impossible amour et la mort, se croisent dans la ville de Pénitence, cité grisâtre aux allures de terminus. Ce récit choral commande un opus d'une lancination funéraire, figé par une tristesse vénéneuse. Battu par une pluie froide, "L'Autre Mort" égrène une partition sépulcrale qui se répand comme une marée noire ('Samedi Vers Minuit'). L'ambiance est cotonneuse, crépusculaire. Seule la voix de Marieke, presque désincarnée toutefois, perce le rideau de brume à la manière d'une pâle vigie, muse fragile et poétique dont les funestes mélopées engourdissent autant qu'elles envoûtent. Leur éclat désolé teinte d'une touche gothique, voire un substrat qui emprunte au funeral doom, un éther blafard ('A Rebours'). Discrète, la guitare tisse une toile dont chaque fil est une note mélancolique ('L'Ombre sur le Trottoir'). Prisonnière d'une faute qui ne peut être pardonnée, l'œuvre bat d'un faible pouls. Le temps y est presque suspendu. Le duo étire les durées pour mieux souligner la fatalité de ces vies naufragées, à l'image de 'Oubliée' dont le (quasi) quart d'heure est léché par une langueur funéraire. Et quand résonne 'Encore la Pluie', la mort, jusque-là en maraude, surgit. Nous franchissons alors le pont qui enjambe toutes ces humanités perdues, pour nous perdre et ne jamais revenir. Evitant tout misérabilisme, "L'Autre Mort" possède la noblesse sinistre du spleen baudelairien que ne peut laisser insensible que ceux qui n'ont connu ni déception ni tristesse, œuvre contrite hantée par le remords. Grey November n'a pas raté son retour. Ce réveil sera-t-il éphémère ? L'avenir nous le dira... (13.01.2019 | Music Waves)
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Grey November | L'autre mort (2018)
Depuis, l'entité se murait dans un lourd silence et ce n'est pas vraiment Grlscz, projet parallèle encore maladroit bien qu'attachant de Cédric Seyssieq, écrivain, photographe et maître des lieux, qui aura su combler une absence qui semblait vouloir peu à peu se muer en tombe. Et alors que nous craignions qu'il ne finisse donc par disparaître à tout jamais, Grey November surgit aujourd'hui du brouillard, en livrant - enfin - une troisième hostie. Au moins, cette rareté ne le rend que plus précieux. Offrande que nous n'attendions presque plus, "L'Autre Mort" est maintenant là, habillée d'un digipack épuré qu'édite le label russe GS Productions. Son titre et l'écrin fantomatique qui le drape nous rassurent d'emblée sur un point : le goût que Cédric cultive pour les univers sombres demeure intact, ainsi que son inspiration. Linceul funèbre et lignes vocales spectrales hantent cette nouvelle création aux couleurs terreuses. Après avoir transposé Edgar Poe, le musicien adapte son propre roman où trois personnages rongés par les regrets, l'impossible amour et la mort, se croisent dans la ville de Pénitence, cité grisâtre aux allures de terminus. Ce récit choral commande un opus d'une lancination funéraire, figé par une tristesse vénéneuse. Battu par une pluie froide, "L'Autre Mort" égrène une partition sépulcrale qui se répand comme une marée noire ('Samedi Vers Minuit'). L'ambiance est cotonneuse, crépusculaire. Seule la voix de Marieke, presque désincarnée toutefois, perce le rideau de brume à la manière d'une pâle vigie, muse fragile et poétique dont les funestes mélopées engourdissent autant qu'elles envoûtent. Leur éclat désolé teinte d'une touche gothique, voire un substrat qui emprunte au funeral doom, un éther blafard ('A Rebours'). Discrète, la guitare tisse une toile dont chaque fil est une note mélancolique ('L'Ombre sur le Trottoir'). Prisonnière d'une faute qui ne peut être pardonnée, l'œuvre bat d'un faible pouls. Le temps y est presque suspendu. Le duo étire les durées pour mieux souligner la fatalité de ces vies naufragées, à l'image de 'Oubliée' dont le (quasi) quart d'heure est léché par une langueur funéraire. Et quand résonne 'Encore la Pluie', la mort, jusque-là en maraude, surgit. Nous franchissons alors le pont qui enjambe toutes ces humanités perdues, pour nous perdre et ne jamais revenir. Evitant tout misérabilisme, "L'Autre Mort" possède la noblesse sinistre du spleen baudelairien que ne peut laisser insensible que ceux qui n'ont connu ni déception ni tristesse, œuvre contrite hantée par le remords. Grey November n'a pas raté son retour. Ce réveil sera-t-il éphémère ? L'avenir nous le dira... (13.01.2019 | Music Waves)
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