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KröniK | Blueneck - The Outpost (2016)


Dans une relative et bien injuste indifférence, Blueneck bâtit peu à peu une œuvre dont la richesse n'a égale que la beauté pointilliste. Bien qu'ils mériteraient de rencontrer un succès au moins aussi important que celui d'un Anathema franchement surestimé, les Anglais semblent se satisfaire de la seule reconnaissance d'un public qui chérit leurs offrandes comme autant de trésors méconnus. Par petites touches, leur post rock évolue, d'abord atmosphérique sur "The Fallen Host", désormais plus hypnotique et intimiste bien qu'irradiant toujours une pâle lumière.
Si la signature du groupe demeure reconnaissable entre mille, notamment grâce au pinceau vocal de Duncan Attwood, chaque album marque un glissement vers une musique de plus en plus désincarnée et solitaire. Succédant à un "King Nine" puissamment cinématique, "The Outpost" illustre à son tour ce lent cheminement. Aussi minimaliste que pulsatif, son menu paraît avalé par une brume épaisse que percent de brusques déchirures. Son écoute revient à errer seul au milieu de paysages fantomatiques. De fait, il se doit d'être appréhendé dans la solitude d'une nuit froide lorsque l'automne commence à s'amasser derrière les carreaux de la fenêtre. S'il a été composé très vite, ce sixième album ne souffre d'aucune approximation, se nourrissant au contraire de la simplicité qui a présidé à sa conception sans pour autant altérer une écriture toujours aussi précise. L'inaugural 'From Beyond' que sabrent des accès de colère ne doit pas vous tromper, amorce peu représentative d'un contenu ouaté et très peu appuyé, quand bien même tout du long, on sent battre une force crépusculaire, témoin l'immense 'Hypnos' au pouls entêtant et proche par ses traits désenchantés d'un No-Man avec lequel Blueneck partage une force émotionnelle identique ('Other Gods'). La mélancolie coutumière des Britanniques palpite de compositions en clair-obscur, d'un calme trompeur comme l'illustre 'Hive', pulsation nimbée d'un lustre électro qui prend aux tripes. Si 'Rats In The Wall' prend la forme d'une sourde élévation, la majorité des titres affiche une tessiture squelettique ('The White Strip'), tissant un rock murmuré quasi silencieux. La tension rentrée que l'on devine sous la surface ne parvient jamais vraiment à maturation, malgré quelques explosions électriques ('Glades'). Comme toujours, Blueneck signe un album parfait de bout en bout, à la fois intime et imbibé d'éther. 4/5 (23/09/2017)






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