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KröniK | Windswept - The Great Cold Steppe (2017)


Roman Saenko ne reste jamais absent bien longtemps, butinant tour à tour un des nombreux projets qu’il a sur le feu. A ce titre, il est permis de s’interroger quant à l’utilité pour un musicien de multiplier ainsi les ports d’attache, éphémères le plus souvent, à l’exception du principal d’entre eux, Drudkh dont la section rythmique, Vlad (batterie) et Kretchet (basse), accompagne qui plus est l’Ukrainien à travers toutes ses pérégrinations, de Blood Of Kingu à Precambrian.
Si la volonté de s’éloigner des rivages du pur black metal pour accoster ceux d’un post rock shoegazien avec un Old Silver Key incompris ou ceux du death metal old school avec un Rattenfänger déjà oublié peut alors justifier cet éparpillement, cela ne garantit cependant pas la pérennité de formations finalement disparues au bout d’un seul essai. Voir le bonhomme, toujours flanqué de ses fidèles comparses, ressurgir sous la bannière d’un énième groupe nous laissait donc quelque peu dubitatifs. Mais, occupant la place laissée vacante suite au sabordage de Blood Of Kingu, celle d’un art noir au sang chargé de fiel, Windswept devrait pourtant affoler les nostalgiques d’un Hate Forest néanmoins inégalé. Aux côté d’un Drudkh qui mise depuis ses débuts sur les atmosphères mélancoliques et boisées plus que sur la froide brutalité, Saenko cherche toujours à épancher sa soif d’agressivité primitive par le biais de créatures de la nuit rongées par la haine. Tel est ainsi le cas de ce nouveau groupe qui le voit vomir dans le micro à la place du pourtant indéboulonnable Thurios (Astrofaes, Kladovest) qui ne prend pas part, cette fois-ci, à l’aventure. Enraciné dans la glaciale géographie mythologique et cosmique de cette Europe de l’Est qui l’a vu naître, "The Great Cold Steppe" martèle durant trente-six petites minutes une violence primaire et viscérale dont aucune interruption ni lancinantes échappées épiques ne viennent en briser le torrent. Bien qu’il s’enfonce parfois dans des mid tempos reptiliens, témoins ‘Black Horizon In The Gates Of A Blizzard ‘, amorce grandiose qui emporte tout dans son ténébreux sillage ou bien encore l’obsédant ‘The Stars Are Cold And Indifferent’ dont on croit qu’il est instrumental jusqu’à ce que le chant n’éructe lors d’une véloce dernière partie, ce menu se rapproche davantage du radical "Sorrow" que du fascinant "Purity", sans pour autant renouer tout à fait avec cette intensité atrabilaire et ce feeling abrupt qui était celui du mal originel. Quoique brute, la prise de son n’est plus la même et Saenko ne sera de toute façon plus jamais vraiment capable de capturer cette essence evil unique, ce que nous avons compris depuis longtemps. Reste que la sève qui coule dans les veines de "The Great Cold Steppe" bouillonne d’une négativité hivernale et tourbillonnante qui fait de lui l’héritier terrifiant de Hate Forest. Construit sur une architecture cyclique, ce méfait s’ouvre et se ferme sur les mêmes notes osseuses aux accents sombrement folkloriques, qui suintent le long des parois de ces sentinelles que sont ‘Black Horizon In The Gates Of A Blizzard’ et à l’autre bout ‘A Spiteful Wind Buries All The Lonely Whispers’. Entre les deux s’enchaînent quatre pulsations tranchantes et pesantes en un défilé haineux. S’il y aura bien quelques grincheux pour pester contre l’Ukrainien lui reprochant une inspiration qu’ils jugeront – à tort – anémique, force est pourtant de reconnaître que ‘The Great Shepherd Rides His Storms’, ‘Shrouded In Pale Shining’ et surtout ‘Blinding And Bottomless Abyss Is Howling’, qu’irrigue une guitare aux allures d’artère glaciale et sinistre, vibrent d’une noirceur vicieuse, confirmant en cela que Saenko reste détenteur de cette bestialité crépusculaire qui n’appartient qu’à lui, sachant toujours faire souffler un blizzard funèbre. L’incontestable réussite de "The Great Cold Steppe" n’échappe toutefois pas à une question : quel sera en définitive l’avenir de Windswept ? Survivra-t-il au-delà de ce galop d’essai ou bien sera-t-il lui aussi condamné à rejoindre très vite ses aînés dans la tombe ? Souhaitons que ce soit la première voie que le groupe décide d’emprunter… 4/5 (2017) | Facebook


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