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Abduction | Une ombre régit les ombres (2016)



















Nous aurions tellement aimé ne dire que du bien de "Une Ombre Régit les Ombres",  premier vrai signe de mort d'Abduction, précédé il y a six ans déjà d'une ébauche prometteuse baptisée "Heights' Shivers".

Parce que ce quatuor témoigne à sa mesure, certes encore modeste, que la semence noire hexagonale, loin de se tarir, ne cesse de s'enrichir. Parce qu'on repère derrière le micro François Blanc, musicien aussi généreux que talentueux, par ailleurs journaliste chez Rock Hard, dont nous suivons depuis longtemps le travail de Angellore au plus méconnu Betray-Ed. Parce que cette expression atmosphérique et déchaînée, rêveuse et hivernale d'un art noir en clair-obscur, est propice à l'édification d'un tertre douloureux, ruisselant une mélancolie terreuse. Parce que ces compositions, de par leurs dimensions des plus étirées, gravitant toutes en cela autour des dix minutes au jus, révèlent l'ambition louable de ses auteurs que n'effraient pas les difficultés. Mais de cette durée parfois excessive naît justement la première (relative) faiblesse de cette offrande qui échoue à captiver sur la longueur.

Comme si le groupe péchait par excès, à trop vouloir en dire, victime de sa logorrhée généreuse, alors que quelques coups de ciseaux auraient suffi à maintenir une intensité qui en l'état s'évapore quelque peu au fil d'une écoute qui recèle toutefois nombre de trésors, enfouis dans l'intimité ténébreuse d'un menu où les ambiances priment sur l'agressivité, quand bien même une noirceur orageuse ne manque pas d'exploser tout du long, par l'entremise de growls écorchés ou de blasts tumultueux ('Une ombre régit les ombres'). Il faut donc peu à peu percer les remparts que dressent ces longues plaintes pour en savourer le suc désespéré que sécrètent, ici des arpèges forestiers, témoin 'L'enlèvement d'Automne' qu'irriguent les poétiques lignes de guitares du maître des lieux, Guillaume Fleury, là un chant clair empreint d'une noblesse solennelle ('Les Frissons des Cimes'). Dommage cependant que cette trame envoûtante, riche de contrastes, soit mitée de manière par trop répétitive sinon automatique par des breaks qui ne se justifient pas toujours, à l'image de 'Naphtalia,' dont les multiples fissures le vident d'une substance qui était pourtant prometteuse. C'est la seconde faiblesse de cet album paradoxalement inabouti, qui laisse au final un goût amer, celui d'être passé à côté de la grande réussite que ses géniteurs n'ont en définitive qu'effleurée. Reste toutefois un sentiment général positif grâce à une exécution irréprochable, une prise de son qui l'est tout autant, due à l'ubiquiste Déhà et une personnalité dont on sent que cet opus ne l'a qu'à peine déflorée. Le long tunnel de silence que le projet a emprunté a imposé à son âme et fondateur une reconstruction dont "Une Ombre Régit les Ombres" est la première étape. Désormais en place, gageons qu'Abduction devrait bien vite gommer ces menus défauts et prendre son envol vers les cieux qui lui sont destinés. (30/10/2016 | Music Waves)




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