A la différence de bien d'autres peintres de l'art noir qui comme lui sont pris de frénétiques diarrhées créatrices, Déhà ne compte pas parmi ces misanthropes reclus chez eux bricolant tout seul dans leur coin des rondelles par palettes entières, aimant au contraire mêler sa généreuse semence à celles d'autres êtres vivants. C'est pourquoi, à peine installé dans la capitale bulgare, l'homme s'associe déjà avec une poignée de musiciens du cru afin de former un nouveau projet, un de plus, dont le premier signe de vie vient encore grossir une discographie bourgeonnante. Sources Of I, c'est son nom, rassemble donc autour de notre cher multi-instrumentiste, des gars issus de groupes tels que Inspell ou Dimholt, inconnus chez nous mais jouissant semble-t-il d'une certaine réputation là-bas. Présent aussi bien devant (chant et basse) que derrière la console, Déhà leur apporte son savoir-faire, assurant de facto la réussite de cette plutôt prometteuse carte de visite. Maigre par son format car long d'à peine vingt minutes, Faces n'a pas besoin de plus pour témoigner du potentiel de ses géniteurs. Ainsi, en trois titres dégorgeant de grandes qualités de canevas aussi bien que d'atmosphères, ce EP esquisse un Black Metal que contaminent de mortifères kystes doom. Animé par trois pistes, le menu doit beaucoup à la première d'entre-elle, la meilleure du lot, la plus belle aussi, longue rumination de près de dix minutes au garrot et parfaite illustration d'une identité déjà fixée. 'Discrepancy Of Life' dévoile les atours d'un metal noir aussi malsain que sinueux dont l'architecture foncièrement dynamique trahit à la fois une écriture très élaborée et sa difficile définition. De fait, si le chant hurlé, les guitares pollués et la lenteur de certains aplats pourraient arrimer Sources Of I au courant DSBM, de multiples détails, à commencer par une dureté de traits et un tempo qui s'emballe sournoisement, viennent en partie infirmer cette impression. Ce que confirment ensuite le plus resserré 'Shadow Of The Stars' puis 'When You Will Close My Eyes', qui évoquent, de manière certes lointaine, le Shining originel (celui de Livets Ändhållplats), en plus mélodique quoique tout aussi froid dans son expression d'une négativité plus introspective qu'agressive. S'il n'est pas la progéniture la plus aboutie de Déhà, il n'en demeure pas moins que Sources Of I n'est pas qu'un simple projet de plus, ayant sa raison d'être et une personnalité réelle que déflore ce Faces dont la courte durée ne l'empêche pas d'être alléchant et d'annoncer ce faisant quelque chose de plus grand encore. (2015)
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