AU PIF

Mudbath | Corrado Zeller (2015)


Plus noir, plus lourd, aller toujours plus loin sur l’échelle de Ritcher des abîmes, tel semble être le credo de toute une génération de musiciens. Les mecs de Mudbath font partie de ces scaphandriers du gros son dont le but est d’atteindre ces profondeurs privées de lumière, de s’aventurer là où l’Homme n’a encore jamais osé se rendre. Installés en Avignon, ces quatre jeunes gens en colère n’ont visiblement peur de rien, crachant aujourd’hui à la face du monde un premier parpaing aussi furieux que fiévreux capable de renvoyer tous les autres apôtres du Sludge Doom des caverne jouer à touche-pipi dans le bac à sable de la maternelle. Ni plus ni moins. De loin, « Corrado Zeller », que précédait en guise des préliminaires abruptes « Red Desert Orgy », ne se distingue par vraiment des autres brûlots du genre. Chant énervé qui hurle comme si demain ne devait plus jamais exister, guitares coulées dans le plomb et intensité organique définissent une expression des plus classiques. De près, en revanche, ça fait beaucoup plus mal, bloc de matière en fusion d’une force titanesque, édifice qui vibre d’une tension palpable et que composent trois titres. Dès l’inaugural ‘Thus I Saw The Destructive Voracity Of An Obsessive  Ritual’, plainte mortifère qui voit le groupe, durant ses dix minutes au jus, dégeuler un venin obsédant, humeur vicieuse pourtant non dénuée d’une forme de beauté, une beauté crasse, le ton est donné, pétrifié et maladif. Trois parties comme dans tout récit tragique, véritable magma belliqueux dont on ne sort pas indemne, torrent de haine constamment au bord de la rupture. Aller jusqu’au bout tient du chemin de croix, acte de pénitence qu’illustrent les 18 minutes du terminal ‘Salmonella’, macération d’une étouffante lenteur aux allures d’agonie sans fin. Ce sont les oreilles en sang et les muqueuses irritées que nous achevons son écoute. Mudbath n’est jamais aussi bon que lorsqu’il arrête le temps, lorsqu’il tricote des instants comme suspendus au dessus du gouffre sans fin, à l’image de la partie centrale de ‘Shrim Alternative Healing Center’, morceau dont la plus courte durée ne l’exonère pas d’une froide négativité. Avec « Corrado Zeller », les Fançais ont accouché d’un monstre, bête incontrôlable qui devrait faire des ravages dans les cerveaux torturés… (2015)



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