Offrir un successeur à « Occult Rock » n'était pas chose aisée. Faire mieux, aller plus loin dans l'expression aussi viscérale que ferrugineuse d'une substance singulière aux allures de magma crépusculaire, faire plus abouti surtout, plus achevé semblait de fait quasiment impossible. Manière d'oeuvre d'art total, bloc de matière indivisible, cet opus pouvait être appréhendé comme un aboutissement dans la carrière des Français auxquels on pardonnera d'être devenus presque à la mode dans certains milieux branchouille de la capitale.
Pourtant, si le groupe devait être défini par une métropole, plus que Paris, c'est vers Berlin, celui des années 60 et 70 notamment, que le choix devrait se porter tant sa musique furieusement expérimentale possède d'évidentes connexions avec l'avant-garde allemande. Depuis une dizaine d'années, le triangle guitare/basse/batterie, toujours composé respectivement de Shanditas, Matthieu Canagier et Antoine Hadjioannou, forge un Rock qui n'appartient à qu'à lui, instrumental et tellurique dont « Voix » est le nouveau signe de mort, lequel a donc la lourde tâche de succéder à ce « Occult Rock » définitif dont il se présente comme l'exact contraire. Aussi ramassée que sa devancière était démesurée, cette offrande affiche un caractère primitif qui peut surprendre voire décevoir mais conserve cette énergie brute typique du son de ses créateurs. Titre court quoique énigmatique, visuel épuré (ce qui n'est pas nouveau pour lui), simple timing en guise de nom de pistes, c'est comme si le groupe avait cette fois-ci cherché à aller (faussement) à l'essentiel, pour ne conserver que les os d'un art face auquel les mots manquent, incapables de le définir avec précision, lequel fusionne la puissance obscure du black metal avec la dimension hypnotique d'un psychédélisme noir. Le fait que « Voix » ait été capturé dans des conditions live participe de cet ascétisme formel, lui conférant en outre cette dimension de rituel cryptique que possède chaque performance aux allures de happening sonore délivrée par Aluk Todolo. Il en résulte un album proche de la transe qui ne peut être émietté, toutes les pistes, aux contours opaques, s'enchaînant les unes aux autres pour se fondre en un labyrinthe méditatif qui palpite d'une force ténébreuse et dont les parois sont secouées par les coups de boutoir d'une guitare hurlante et reptilienne que souligne une rythmique métronomique. Sa signature indélébile, on aurait pu craindre que le power trio ne se répète, pourtant il n'en est rien. Alors certes, l'habitué ne sera pas perdu au milieu de ce déluge magnétique mais le groupe réussit pourtant le tour de force de se renouveler, de transcender son matériau dont les possibilités évolutives paraissent du coup infinies, gageure qu'illustre notamment '7 :01' hanté par des accords quasi jazzy (selon la définition la plus sombre du genre) aussi déglingués qu'agonisants, quand le groupe se met à tricoter des instants mortifères durant de longues minutes en apnée. Et alors qu'on s'interrogeait sur sa capacité à survivre à "Occult Rock", Aluk Todolo enfante un album qui à la fois s'en éloigne de part la forme et le concept tout en lui étant complémentaire. Loin d'être un simple disque de plus, "Voix" est le fruit d'artistes qui continuent de travailler leur art. Solitaire(s). Visionnaire(s). Unique(s). (29/01/2016)
Pourtant, si le groupe devait être défini par une métropole, plus que Paris, c'est vers Berlin, celui des années 60 et 70 notamment, que le choix devrait se porter tant sa musique furieusement expérimentale possède d'évidentes connexions avec l'avant-garde allemande. Depuis une dizaine d'années, le triangle guitare/basse/batterie, toujours composé respectivement de Shanditas, Matthieu Canagier et Antoine Hadjioannou, forge un Rock qui n'appartient à qu'à lui, instrumental et tellurique dont « Voix » est le nouveau signe de mort, lequel a donc la lourde tâche de succéder à ce « Occult Rock » définitif dont il se présente comme l'exact contraire. Aussi ramassée que sa devancière était démesurée, cette offrande affiche un caractère primitif qui peut surprendre voire décevoir mais conserve cette énergie brute typique du son de ses créateurs. Titre court quoique énigmatique, visuel épuré (ce qui n'est pas nouveau pour lui), simple timing en guise de nom de pistes, c'est comme si le groupe avait cette fois-ci cherché à aller (faussement) à l'essentiel, pour ne conserver que les os d'un art face auquel les mots manquent, incapables de le définir avec précision, lequel fusionne la puissance obscure du black metal avec la dimension hypnotique d'un psychédélisme noir. Le fait que « Voix » ait été capturé dans des conditions live participe de cet ascétisme formel, lui conférant en outre cette dimension de rituel cryptique que possède chaque performance aux allures de happening sonore délivrée par Aluk Todolo. Il en résulte un album proche de la transe qui ne peut être émietté, toutes les pistes, aux contours opaques, s'enchaînant les unes aux autres pour se fondre en un labyrinthe méditatif qui palpite d'une force ténébreuse et dont les parois sont secouées par les coups de boutoir d'une guitare hurlante et reptilienne que souligne une rythmique métronomique. Sa signature indélébile, on aurait pu craindre que le power trio ne se répète, pourtant il n'en est rien. Alors certes, l'habitué ne sera pas perdu au milieu de ce déluge magnétique mais le groupe réussit pourtant le tour de force de se renouveler, de transcender son matériau dont les possibilités évolutives paraissent du coup infinies, gageure qu'illustre notamment '7 :01' hanté par des accords quasi jazzy (selon la définition la plus sombre du genre) aussi déglingués qu'agonisants, quand le groupe se met à tricoter des instants mortifères durant de longues minutes en apnée. Et alors qu'on s'interrogeait sur sa capacité à survivre à "Occult Rock", Aluk Todolo enfante un album qui à la fois s'en éloigne de part la forme et le concept tout en lui étant complémentaire. Loin d'être un simple disque de plus, "Voix" est le fruit d'artistes qui continuent de travailler leur art. Solitaire(s). Visionnaire(s). Unique(s). (29/01/2016)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire