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KröniK | Blueneck - The Fallen Host (2009)


J'ai pleuré. Oui, j'ai pleuré en m'abîmant entre les bras de The Fallen Host. J'ai pleuré et ce, dès les premières mesures de l'introductif "Depart From Me, You...", montée en puissance dans l'intensité dramatique. Un piano aux accents mortuaires et un violon d'une gravité solennelle ont suffit à cela. En l'espace de quelques minutes à peine, Blueneck, dont c'est le second chef-d'œuvre, pose le décor, un décor qui sera à l'image de la vie, triste et désespérée.
The Fallen Host prend véritablement son envol avec "Seven", perle instrumentale d'un post rock diaphane écrit à l'encre grise d'une trajectoire d'émotion à fleur à de peau. Ces lignes de violon convoquent le fantôme du Anathema période Alternative 4 : c'est magnifique. Et les guitares, lourdes et stratosphériques à la fois, décollent vers un ciel assombri par les nuages. On frissonne face à une telle beauté évanescente qui progresse vers un absolu bouleversant. Par la suite, premier titre chanté, "Low", gemme mélancolique, a quelque chose d'une ballade désenchantée en hiver le long d'une plage anglaise solitaire. Blueneck y navigue alors dans les eaux d'un rock intimiste et épuré à la No-Man.  La voix est feutrée, presque un murmure. Puis ces lignes vocales cèdent la place à des six-cordes squelettiques qui s'élèvent peu à peu en un arc-en-ciel noir et gris cependant que le violon vient souligner de son trait sévère cette courbe atmosphérique. La tension est là, palpable ; on sent qu'elle va exploser. Ce moment semble être repoussé. Le temps est suspendu durant de longues minutes qui meurent en un final instrumental majestueux. Désincarné, "The Guest" lui succède en une respiration hypnotique. Vierges de chant, "Children Of Amme" et "Weaving spiders come not here" sont quant à elles deux pulsions crépusculaires qui cimentent le début et la fin du disque, aux confins de la trip hop pour la première, plus funéraire pour la seconde. Les Anglais y démontrent encore une fois leur maîtrise de la progression émotionnelle et dépouillée. Retour de la voix de Duncan Attwood, plus spectrale encore, avec le superbe "Lilitu", diamant introspectif qui sera vous faire tirer des larmes. J'ai d'ailleurs pleuré à nouveau face à cette capacité à toucher le cœur avec un minimalisme remarquable. Ce morceau est tout ce que le Anathema contemporain rêverait de pouvoir exprimer sans néanmoins y parvenir. C'est un titre presque impalpable : quand on croit pouvoir le toucher, il vous échappe finalement... à tout jamais. Automnaux, ces paysages qui surgissent dans le voile brumeux, sont figés dans le froid et la grisaille. Puis, le cœur s'arrête peu à peu de battre avec "Revelations", terminale et aérienne envolée qui émeut par sa touchante simplicité. Tout doucement, l'issue approche, au bout de ses lignes de guitares floydiennes. Le ton se durcit enfin, le rythme s'enfonce dans un substrat plus pétrifié, conclusion à la démesure tragique. Vous l'aurez compris, avec The Fallen Host, Blueneck vient ni plus ni moins d'écrire une des plus belles pages du rock d'aujourd'hui au point que si le groupe devait s'arrêter maintenant, il aurait tout de même gagné sa place parmi les plus grands. 4.5/5 (2009)





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