Si, de part sa dimension forestière et séculaire, le black metal païen est propice à une forme d'expression osseuse et acoustique, accoucher d'une offrande totalement dénudée d'éléments électriques n'est pas un exercice aisé à accomplir, loin s'en faut. Grand est le piège tendu par l'ennui et les limites de l'entreprise affleurent alors rapidement à la surface. Surtout, faire mieux dans le style que le quintessentiel "Kveldssanger" que Ulver a gravé en 1995 semble difficile voire impossible. Malgré son incontestable talent, le fait que Winterfylleth ait décidé de tenter l'aventure acoustique n'était pas nécessairement une bonne idée. Car c'est en coulant une fureur abrasive et granitique dans une beauté boisée que l'art noir des Anglais puise sa force et sa dimension mythologique.
Dépouillé de ses reliefs tranchants, on pouvait craindre de voir ce décor meurtri se réduire à une plaine monotone, aussi touchante soit-elle. Sa durée, presque une heure au garrot, n'était pas non plus pour nous rassurer quant à la capacité de ce "The Hallowing Of Heirdom" à maintenir tout du long l'intérêt et nos sens en éveil. Or et contre toute attente, le quatuor de Manchester livre une réussite exemplaire, trouvant toujours le ton juste, empreint de noblesse et de gravité. De ces arpèges bucoliques coule une émotion épurée qui ravive des plaies restées fermées depuis longtemps, témoin le douloureux 'Embers'. De ces aplats squelettiques naissent des paysages à la fois rudes et mélancoliques que l'on sillonne à travers une sente ombrageuse aux couleurs automnales. Le concept qui a présidé à la réalisation de ce sixième opus permet à ses créateurs de puiser dans ses racines celtiques et ancestrales ('Æcerbot', 'On-Cýdig'), auxquelles participent des lignes de violon décharnées ('Resting Tarn'). D'une grande sécheresse de trait, l'œuvre n'en est pas moins extrêmement travaillée. Aux côtés de courtes respirations belles comme un chat qui dort en boule ('A Gleeman's Volt', "Halgemonat'), des pièces plus étirées déroulent leur trame émotionnelle, à l'image des deux sentinelles 'The Sheperd' et 'The Hallowing Of Heirdom', longues de plus de sept minutes. Qu'elle soit acoustique ne signifie pas que l'offrande tavelée de multiples arrangements soit instrumentale. Plusieurs de ses plaintes se voient ainsi bercées par un chant solennel ou des chœurs majestueux ('Frithgeard'). De même, ce format n'induit pas un caractère enjoué et dansant. Au contraire, comme l'illustre le tragique 'Latch To A Grave', l'œuvre plonge dans un désespoir funèbre qui ne la rend que plus belle et déchirante. Sans égaler les Norvégiens, il est pourtant permis d'affirmer que Winterfylleth vient de déposer au pied de cette muse forestière une gemme noire avec "The Hallowing Of Heirdom" dont on peut dire qu'il est non seulement l'album le plus étonnant des Anglais mais sans doute aussi un des plus maîtrisés. Mieux, ceux-ci paraissent même s'être ressourcés, renouant avec une inspiration vibrante. (17/03/2018)
Dépouillé de ses reliefs tranchants, on pouvait craindre de voir ce décor meurtri se réduire à une plaine monotone, aussi touchante soit-elle. Sa durée, presque une heure au garrot, n'était pas non plus pour nous rassurer quant à la capacité de ce "The Hallowing Of Heirdom" à maintenir tout du long l'intérêt et nos sens en éveil. Or et contre toute attente, le quatuor de Manchester livre une réussite exemplaire, trouvant toujours le ton juste, empreint de noblesse et de gravité. De ces arpèges bucoliques coule une émotion épurée qui ravive des plaies restées fermées depuis longtemps, témoin le douloureux 'Embers'. De ces aplats squelettiques naissent des paysages à la fois rudes et mélancoliques que l'on sillonne à travers une sente ombrageuse aux couleurs automnales. Le concept qui a présidé à la réalisation de ce sixième opus permet à ses créateurs de puiser dans ses racines celtiques et ancestrales ('Æcerbot', 'On-Cýdig'), auxquelles participent des lignes de violon décharnées ('Resting Tarn'). D'une grande sécheresse de trait, l'œuvre n'en est pas moins extrêmement travaillée. Aux côtés de courtes respirations belles comme un chat qui dort en boule ('A Gleeman's Volt', "Halgemonat'), des pièces plus étirées déroulent leur trame émotionnelle, à l'image des deux sentinelles 'The Sheperd' et 'The Hallowing Of Heirdom', longues de plus de sept minutes. Qu'elle soit acoustique ne signifie pas que l'offrande tavelée de multiples arrangements soit instrumentale. Plusieurs de ses plaintes se voient ainsi bercées par un chant solennel ou des chœurs majestueux ('Frithgeard'). De même, ce format n'induit pas un caractère enjoué et dansant. Au contraire, comme l'illustre le tragique 'Latch To A Grave', l'œuvre plonge dans un désespoir funèbre qui ne la rend que plus belle et déchirante. Sans égaler les Norvégiens, il est pourtant permis d'affirmer que Winterfylleth vient de déposer au pied de cette muse forestière une gemme noire avec "The Hallowing Of Heirdom" dont on peut dire qu'il est non seulement l'album le plus étonnant des Anglais mais sans doute aussi un des plus maîtrisés. Mieux, ceux-ci paraissent même s'être ressourcés, renouant avec une inspiration vibrante. (17/03/2018)
4/5 | Music Waves
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