En l'espace d'une dizaine d'années, Fen a su occuper une place à part au sein de la chapelle noire de la Perfide Albion, forgeant un art unique où la puissance abrasive d'un black metal évolutif se conjugue aux émotions charriées par un post rock forestier. Chaque nouvelle offrande des Anglais efface le souvenir laissé par son prédécesseur pour s'imposer comme la pierre angulaire d'une discographie fascinante.
Si depuis ses débuts en 2006, il nous avait habitué à un rythme régulier, n'espaçant ses créations que d'un an ou deux, le groupe semblait être l'arrêt depuis 2014 et un "Carrion Skies" aux allures d'aboutissement. Et ce n'est pas l'arlésienne "Call Of Ashes II / Stone And Sea" split partagé avec les Russes de Sleepwalker", finalement publié avec des mois de retard, qui nous rassurait. Mais ce (trop) long tunnel aura donc enfin été brisé. Et doublement. Tout d'abord par l'alliance sus-citée, découverte il y a peu et surtout par ce "Winter" qui, encore une fois, nous fera oublier ses devanciers pourtant ô combien mémorables. Si son titre quelconque pouvait laisser craindre un simple album de plus sinon une créativité en berne, ces doutes somme toute bien relatifs se trouvent vite balayés par un contenu d'une démentielle richesse. Prometteuse, son architecture, basée sur six pistes dont une seule - et de peu - descend sous la barre des dix minutes cependant que la première d'entre elles franchit celle des dix-sept minutes, durée que les Britanniques n'avaient encore jamais atteint même si les compos aux formes démesurées définissent depuis toujours leur identité sonore, augurait d'emblée d'une réussite majeure. Dont acte. Fidèles à leur habitude, les musiciens lancent l'écoute avec ce qui se révèle être sans doute la plus belle création de ce cinquième opus. Après une lente et pulsative entame qu'un chant clair irrigue, 'Pathway' bascule brutalement dans des froides ténèbres. La voix de The Watcher se fait hargneuse, mordant la chair jusqu'au sang mais très vite la guitare perce ce rempart vertigineux, laissant filtrer à travers la pierre des rais d'émotions. Aucune longueur ni temps mort ne viennent grever cette composition-fleuve où alternent les contrastes, tour à tour torrentielle ou aérée, agressive ou apaisée, galopant le long d'un chemin obscur et sinueux que bordent des passerelles atmosphériques, jusqu'à un final squelettique qui s'enchaîne à un 'Penance' orageux mais lui aussi travaillé par de multiples forces. Guidé par une basse mangeuse d'espace, sa conclusion s'envole très haut, emportée par de furieux rouleaux. Tricotant tout d'abord de douces notes post rock, 'Fear' avale ensuite tout sur son passage, suivant le sillon terreux creusé par cette guitare à la fois ferrugineuse et pointilliste. Quoique fait du même bois, 'Interment' ne cesse d'être écartelé entre noirceur et lumière, accueillant quelques lignes de chant clair. Avec le bien nommé 'Death', l'hiver s'installe durablement, pièce qui meurt cependant peu à peu de façon délicate après avoir été le théâtre d'une violence noire, annonçant l'épilogue ('Sight') qui suit un tracé inverse, de la pale lumière au crépuscule glacial. Mais plus que l'agrégat de morceaux mis bout à bout, que l'on picore par miette, "Winter" se doit être abordé comme un seul bloc indivisible dont chaque acte s'emboîte pour former une symphonie aussi belle que désespérée, aussi minérale que planante. Sans se départir de sa signature gravée dans la roche, Fen accouche à nouveau d'une oeuvre monumentale autant dans sa forme que dans sa richesse, opus foisonnant aux couleurs hivernales. 4/5 (2017) | Facebook
Si depuis ses débuts en 2006, il nous avait habitué à un rythme régulier, n'espaçant ses créations que d'un an ou deux, le groupe semblait être l'arrêt depuis 2014 et un "Carrion Skies" aux allures d'aboutissement. Et ce n'est pas l'arlésienne "Call Of Ashes II / Stone And Sea" split partagé avec les Russes de Sleepwalker", finalement publié avec des mois de retard, qui nous rassurait. Mais ce (trop) long tunnel aura donc enfin été brisé. Et doublement. Tout d'abord par l'alliance sus-citée, découverte il y a peu et surtout par ce "Winter" qui, encore une fois, nous fera oublier ses devanciers pourtant ô combien mémorables. Si son titre quelconque pouvait laisser craindre un simple album de plus sinon une créativité en berne, ces doutes somme toute bien relatifs se trouvent vite balayés par un contenu d'une démentielle richesse. Prometteuse, son architecture, basée sur six pistes dont une seule - et de peu - descend sous la barre des dix minutes cependant que la première d'entre elles franchit celle des dix-sept minutes, durée que les Britanniques n'avaient encore jamais atteint même si les compos aux formes démesurées définissent depuis toujours leur identité sonore, augurait d'emblée d'une réussite majeure. Dont acte. Fidèles à leur habitude, les musiciens lancent l'écoute avec ce qui se révèle être sans doute la plus belle création de ce cinquième opus. Après une lente et pulsative entame qu'un chant clair irrigue, 'Pathway' bascule brutalement dans des froides ténèbres. La voix de The Watcher se fait hargneuse, mordant la chair jusqu'au sang mais très vite la guitare perce ce rempart vertigineux, laissant filtrer à travers la pierre des rais d'émotions. Aucune longueur ni temps mort ne viennent grever cette composition-fleuve où alternent les contrastes, tour à tour torrentielle ou aérée, agressive ou apaisée, galopant le long d'un chemin obscur et sinueux que bordent des passerelles atmosphériques, jusqu'à un final squelettique qui s'enchaîne à un 'Penance' orageux mais lui aussi travaillé par de multiples forces. Guidé par une basse mangeuse d'espace, sa conclusion s'envole très haut, emportée par de furieux rouleaux. Tricotant tout d'abord de douces notes post rock, 'Fear' avale ensuite tout sur son passage, suivant le sillon terreux creusé par cette guitare à la fois ferrugineuse et pointilliste. Quoique fait du même bois, 'Interment' ne cesse d'être écartelé entre noirceur et lumière, accueillant quelques lignes de chant clair. Avec le bien nommé 'Death', l'hiver s'installe durablement, pièce qui meurt cependant peu à peu de façon délicate après avoir été le théâtre d'une violence noire, annonçant l'épilogue ('Sight') qui suit un tracé inverse, de la pale lumière au crépuscule glacial. Mais plus que l'agrégat de morceaux mis bout à bout, que l'on picore par miette, "Winter" se doit être abordé comme un seul bloc indivisible dont chaque acte s'emboîte pour former une symphonie aussi belle que désespérée, aussi minérale que planante. Sans se départir de sa signature gravée dans la roche, Fen accouche à nouveau d'une oeuvre monumentale autant dans sa forme que dans sa richesse, opus foisonnant aux couleurs hivernales. 4/5 (2017) | Facebook
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