Disparu des écrans-radars depuis presque sept ans, nous n'espérions plus vraiment recevoir un nouveau signe de mort de la part de Allseits, croyant l'entité endormie pour toujours. Quelle ne fut donc pas notre surprise en voyant Cyclic Law annoncer son retour. Pour ceux qui ne le connaissent pas ou l'ont oublié (ce qui semble inconcevable), il est sans doute bon de planter le décor, celui de la scène drone ambient germanique qui a vu naître cette créature solitaire entre les mains de la seule Nina Kernicke.
En 2009, "Hel" a démontré de la plus oppressante des manières que les hommes n'avaient pas le monopole d'une noirceur à la fois désincarnée et organique, œuvre hermétique alliant en un magma hypnotique le feu et la glace. "Chimäre", qui lui succède enfin, s'en éloigne fortement, quand bien même les deux albums partagent cette puissance souterraine et cette façon d'avaler l'espace environnant identiques. Au format relativement ramassé (pour le style, s'entend) d'autrefois, cette deuxième exploration privilégie les durées étirées, tentaculaires, gravitant souvent autour des quinze minutes au compteur. Cette architecture démesurée induit une lancinance répétitive qui confine à une forme de funèbre mantra. La maîtresse des lieux prend ainsi son temps pour tricoter un maillage grondant chargé d'émanations mortifères. Mais ce qui frappe d'emblée à l'écoute de ces plus de soixante minutes de sonorités froides, est cette fulgurante beauté qui sourdre de ces palpitations aussi cataclysmiques que contemplatives. Masse pulsative d'une force tellurique, l'opus se dresse comme un seul bloc qui ne peut être fragmenté, devant au contraire être défloré dans sa globalité turgescente, ce qu'explique sa nature conceptuelle, basé sur la dualité entre ce que nous aimerions être et ce que nous sommes. Prologue long de près de dix minutes, 'Drown' installe l'auditeur dans une atmosphère inquiétante, lente élévation presque immobile, dont les traits bourgeonnants sont léchés par une lèpre ferrugineuse. Premier gros morceau (dans tous les sens du terme) de ce pantagruélique menu, 'October' surprend par ses atours martiaux, monument noir que secouent des martèlements autoritaires qui se répètent à l'infini sur fond de nappes ambient enveloppantes et suintant une absolue décrépitude. Suivent deux respirations aux allures de pauses, 'In The Hills', plainte rêveuse que polluent cependant des vagues drone mystérieuses, puis 'Interlude', piste qui se rapproche le plus de 'Hel'. La seconde demi heure est remplie par le ressac dissonant de deux pulsations aux dimensions colossales. 'Sink In Sideways', véritable plongée dans la psyché humaine, laquelle palpite d'une sève industrielle menaçante qui se répand en un tapi de sons abrasifs. Enfin, 'Monster' grouille de sonorités déglinguées qui prolifèrent jusqu'à contaminer cette écoute qui meurt dans une apothéose nihiliste.Notre attente se voit donc aujourd'hui récompensée par ce "Chimäre" d'une puissance d'évocation et d'émotion qui fait de lui un mausolée vertigineux à la gloire des musiques sombres. 4.5/5 (2016)
En 2009, "Hel" a démontré de la plus oppressante des manières que les hommes n'avaient pas le monopole d'une noirceur à la fois désincarnée et organique, œuvre hermétique alliant en un magma hypnotique le feu et la glace. "Chimäre", qui lui succède enfin, s'en éloigne fortement, quand bien même les deux albums partagent cette puissance souterraine et cette façon d'avaler l'espace environnant identiques. Au format relativement ramassé (pour le style, s'entend) d'autrefois, cette deuxième exploration privilégie les durées étirées, tentaculaires, gravitant souvent autour des quinze minutes au compteur. Cette architecture démesurée induit une lancinance répétitive qui confine à une forme de funèbre mantra. La maîtresse des lieux prend ainsi son temps pour tricoter un maillage grondant chargé d'émanations mortifères. Mais ce qui frappe d'emblée à l'écoute de ces plus de soixante minutes de sonorités froides, est cette fulgurante beauté qui sourdre de ces palpitations aussi cataclysmiques que contemplatives. Masse pulsative d'une force tellurique, l'opus se dresse comme un seul bloc qui ne peut être fragmenté, devant au contraire être défloré dans sa globalité turgescente, ce qu'explique sa nature conceptuelle, basé sur la dualité entre ce que nous aimerions être et ce que nous sommes. Prologue long de près de dix minutes, 'Drown' installe l'auditeur dans une atmosphère inquiétante, lente élévation presque immobile, dont les traits bourgeonnants sont léchés par une lèpre ferrugineuse. Premier gros morceau (dans tous les sens du terme) de ce pantagruélique menu, 'October' surprend par ses atours martiaux, monument noir que secouent des martèlements autoritaires qui se répètent à l'infini sur fond de nappes ambient enveloppantes et suintant une absolue décrépitude. Suivent deux respirations aux allures de pauses, 'In The Hills', plainte rêveuse que polluent cependant des vagues drone mystérieuses, puis 'Interlude', piste qui se rapproche le plus de 'Hel'. La seconde demi heure est remplie par le ressac dissonant de deux pulsations aux dimensions colossales. 'Sink In Sideways', véritable plongée dans la psyché humaine, laquelle palpite d'une sève industrielle menaçante qui se répand en un tapi de sons abrasifs. Enfin, 'Monster' grouille de sonorités déglinguées qui prolifèrent jusqu'à contaminer cette écoute qui meurt dans une apothéose nihiliste.Notre attente se voit donc aujourd'hui récompensée par ce "Chimäre" d'une puissance d'évocation et d'émotion qui fait de lui un mausolée vertigineux à la gloire des musiques sombres. 4.5/5 (2016)
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