Obscure et ténébreuse, la chapelle noire portugaise compte depuis ces dernières années parmi les plus passionnantes, scène palpitant de mort plutôt que de vie où l'orthodoxie d'un art primitif et cryptique prime sur une approche évolutive sinon moderne bannie du vocabulaire sonore de ces hordes souvent mystérieuses exaltant tous les codes du genre, autant dans la forme que dans le fond, ceux du mal originel et séculaire. Black Cilice est l'un des noms les plus cultes de ce terreau lusitanien dont il symbolise admirablement les valeurs, créature nocturne et solitaire grimée de corpsepaint et auteur énigmatique car anonyme d'une oeuvre bordélique où depuis (seulement) 2009, se succèdent démos et autres splits de rigueur tirés en nombre limité pour le plus grand plaisir des collectionneurs pour qui le Black Metal doit rester cet art de l'ombre réservé à une poignée, ce qu'il aurait toujours dû rester. Ayant canalisé - pour le moment - ce flot qui lui sort des orifices, le Portugais se fait désormais plus rare, privilégiant depuis deux ans le format long aux petites saillies. C'est pourquoi seule une compilation ( Old Curses ) sépare Summoning The Beast de Mysteries , troisième véritable méfait qui nous intéresse aujourd'hui, lequel porte l'incontestable marque, aussi sinistre qu'écorchée, de son procréateur. A l'épure d'une pochette où se découpe sur un fond noir la tête de goule du maître des lieux répond un art à la prise de son polluée, suintant de négativité par tous les pores, un art qui semble ne faire qu'un avec la nuit et les démons qui l'accompagnent. Au programme, six pistes peut-être mais surtout un édifice de 38 minutes aux contours flous qui a quelque chose d'un magma gargouillant d'une espèce d'énergie tellurique. Tous les titres paraissent se confondre les uns les autres pour se fondre en une bouillie infâme d'où émergent hurlements possédés et riffs déglingués mais aussi un lointain éclat méphitique. A la fois rapide et hypnotique, régurgitant un mal-être absolu et labourant les chairs à vif, ces longues macérations ne filent jamais droit, elles semblent avoir été capturées au fond d'une cave qu'éclaire une pâle bougie. Ce faisant, Black Cilice restaure cette noirceur unique venue des profondeurs de la terre qui caractérise le Black Metal originel. Et si au final, on n'a pas tout compris, s'impose l'impression d'avoir été emporté par un torrent fielleux aux allures de transe assourdissante. (2015)
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