Jonas Kjellgren fait partie de ces priapiques de la création artistique qui ne peuvent se contenter d’un seul groupe, d’une seule activité. Guitariste et compositeur aussi bien pour Scar Symmetry, et autrefois Centinex, ou Carnal Forge, le Suédois veille également sur toutes les étapes de fabrication : enregistrement, mixage, mastering. Bref, c’est un artiste complet comme on les aime garanti ou remboursé 100 % sincère et intègre. World Below lui permet d’épancher sa soif de doom. Mais autant Scar Symmetry par exemple, développe une vision moderne du death metal, autant, World Below reste fidèle à une formule classique initiée par Candlemass et consorts. Point de grognements d’outre-chiotte ou de descentes spéléologiques dans ce Repulsion, troisième offrande du trio formé outre le Jonas, de Mikael Danielsson au chant et à la basse (son chant, clair et personnel, est d’ailleurs un des atouts du groupe) et de Ronnie Bergerstahl derrière les fûts. Ceci dit, les lascars n’ont de leçon à recevoir de personne en terme de lourdeur et de puissance de feu, ces cinq enclumes en sont la preuve. Nourries au heavy metal, elles écrasent tout sur leur passage au point de pouvoir arracher le papier peint de votre chambre en quelques riffs bien velus (le monstrueux « 731 »). Extrêmement mélodiques, à l’image de « Gilgamesh » (un clin d’œil à l’auteur de SF Robert Silverberg ?), ces titres prennent leur temps – sept minutes en moyenne – tout en demeurant toujours accrocheurs. Car World Below sait surtout écrire de vraies chansons, certes longues mais qui ne s’égarent jamais dans les sables mouvants de la lenteur agonisante étirée jusqu’aux confins du supportable (option généralement retenue par les Finlandais). C’est du doom OK, mais avec des couilles et des poils sous les bras ! Toutefois, les Suédois n’ont pas peur de se lancer dans l’exercice périlleux du titre fleuve comme l’illustre l’épique « Monument » (ça ne s’invente pas), marmite de près de 20 minutes où bouillonnent de nombreuses influences : progressives (on pense parfois aux vieux King Crimson), folkloriques (un peu), hard rock (pour certains soli)…. Traversée par de multiples ambiances, cette pièce clôt l’album en beauté, apothéose jouissive qui n’a pas besoin de Viagra pour avoir une trique insolente. Dans la droite lignée de l’acclamé Maelstrom, Repulsion n’a donc rien de répulsif, bien au contraire on tient là un monument du genre que votre pharmacien recommande chaudement à tous les amateurs de doom classique et burné à la fois avec ce petit quelque chose en plus qui distingue les musiciens talentueux des simples suiveurs. 4/5 (2006)
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