Qu'il est loin le temps désormais où les premières fois se soldaient par de maladroites tentatives, parfois non sans un certain charme il est vrai, mais trahissant l'incertitude qui anime alors les groupes à leurs débuts. Au contraire, il n'est plus rare aujourd'hui de découvrir des galops d'essai d'une redoutable maîtrise, œuvre de musiciens déjà sûrs de leur art. Tel est ainsi le cas de Praetoria qui, formé en 2009, se fend avec Mirror Of Modernity d'un opus séminal qui, de part ses insolentes qualités, semble être le rejeton d'une longue lignée d'albums. Seul le style pratiqué permet de deviner la jeunesse de ce combo en devenir, artisan d'un Metal sévèrement burné qui tête les mamelles du Death, du Thrash et du metalcore. Bref, c'est du lourd, du furieux, du qui éructe ses boyaux. Pas très novateur sans doute, encore que maints détails, sur lesquels nous reviendrons, viennent quelque peu dévier la trajectoire que ces cartouches semblent vouloir prendre, mais l'ensemble sonne extrêmement carré, professionnel, comme une mécanique bien huilée qui jamais ne se grippe. Trapus, ces onze titres son propulsés par une énergie implacable, ils abattent le petit bois, emportés par un chant énervé et une rythmique métronomique. Techniques et enrobés dans l'habillage sonore ad hoc qui laisse à chaque instrument l'espace nécessaire pour s'exprimer, ils avalent les minutes avec une cadence soutenue sans que la tension ne débande, à aucun moment. En cela, Mirror Of Modernity respecte haut la main le cahier des charges qui a présidé à sa conception. Cela pourrait être suffisant mais Praetoria injecte à un schéma éprouvé sa propre personnalité et surtout une bonne dose d'idées. Il en résulte un album constellé de breaks, soli et mélodies judicieux qui rendent l'écoute passionnante de bout en bout. Loin d'être linéaire, chaque compo a des allures de montagnes russes, traversée de multiples déchirures. Toutes sont plus redoutables les unes que les autres, de 'Inhumanity Is Complete' à 'The Passenger', de 'The Oath' à 'This World Immersed', qu'irriguent des lignes de parties de guitares orgasmiques. Ce faisant, elles témoignent d'un long et évident travail d'élaboration, qui pourtant n'étouffe pas leur puissance et encore moins leur spontanéité. N'hésitant ni placer un court instrumental acoustique beau comme un chat qui dort ('Praetorians') ni à livrer des paroles en français ('L'insouciant', peut-être même le titre le plus brutal et épidermique du lot), le groupe réussit son coup d'essai en conjuguant violence millimétrée et mélodies acérées. (2015)
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